PACS et testament - Gare à l'abus de droit fiscal
"All You Need Is Love", est-elle une justification suffisante en matière fiscale ? Excellente question en cette journée de Saint Valentin !!
Si nos amoureux vivent "d'amour et d'eau fraiche", il ne devrait y avoir aucun nuage fiscal à l'horizon...
En revanche, si, suite à un coup de foudre, nos amoureux filent directement chez leur notaire pour signer, de façon concomitante, un testament et un contrat de pacs ET que l'un d'entre eux succombe malheureusement dans les jours suivants (tragédie shakespearienne), le survivant risque de passer de son état de béatitude sur un petit nuage... à celui de décrépitude sous un gros orage fiscal !
En effet, s'il y a bien quelques chose qui attire l'œil de l'administration fiscale c'est la concomitance des opérations, surtout lorsqu'il y a un gros avantage fiscal à la clé.
Or, Juliette, notre partenaire survivante, va évidemment avoir la tentation :
👉 d'accepter le legs universel consenti par Roméo, riche défunt,
👉 de solliciter une exonération totale de droits de succession (796-0 bis du CGI) !!
Juliette va assurer à son notaire que :
- Roméo était "l'homme de sa vie",
- ils avaient plein de projet d'avenir,
- l'amour est plus fort que tout, qu'il n'a pas d'âge et que les opérations réalisées sont bien la preuve d'un engagement réciproque pur et désintéressé...
Et là, nouvelle tragédie (fiscale cette fois), en raison du casting de Cupidon. En effet, la difficulté est que notre Juliette (40 ans) et notre Roméo (75 ans, avec un état de santé fragile) n'ont pas eu le temps d'avoir de communauté de vie et d'intérêts avant le décès.
Or, l'article 515-4 du Code civil prévoit clairement que "Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'engagent à une vie commune, ainsi qu'à une aide matérielle et une assistance réciproques. Si les partenaires n'en disposent autrement, l'aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives."
Prudent, le notaire va informer Juliette que, si elle dépose la déclaration de succession avec cette exonération, l'administration risque :
👉 de la contrôler, dans les 6 ans du décès, pour s'assurer des conditions de la conclusion du contrat de pacs,
👉 de ne pas partager cette vision romantique de leur histoire et que, à défaut de preuve de leurs intérêts communs, elle pourrait considérer que le contrat de pacs avait un but exclusivement fiscal et ainsi mettre en œuvre la procédure d'abus de droit fiscal pour réclamer à Juliette : des droits de succession à 60 %, avec application de la majoration de 80 % et des intérêts de retard !!
Moralité : En matière fiscale, "All You Need Is Love" sera généralement une modalité de preuve insuffisante, donc il faudra impérativement pouvoir corroborer son histoire d'amour avec des justificatifs compatibles avec la preuve écrite, pour convaincre tant l'administration fiscale que les juges.
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